Edito

Octobre aura été marqué par des contreperformances des principales classes d’actifs : sur les indices actions -3,30% pour l’Eurostoxx 50 et -0,92% pour le S&P500 ; côté obligataire -0,75% et -1,54% pour les indices Bloomberg Barclays € Aggregate et Global (couvert en euro). L’indice de volatilité Vix, régulièrement qualifié d’indice de la peur, est en revanche en hausse marquée de +38% à 23, niveau encore raisonnable, quand l’or, actif refuge par excellence, a touché un nouveau plus haut historique à 2790 USD l’once. Les marchés, plus précisément les investisseurs qui les composent, dans leur myopie habituelle, se sont rappelés que l’élection américaine se tenait en novembre. L’enchaînement des sondages donnant Trump gagnant avec de plus en plus d’avance (jusqu’à un très annonciateur 312 vs 226 le 28 octobre) ont fini par obnubiler. Dépenses publiques à 10 000 Mds USD sur 10 ans, indépendance de la Fed, guerre commerciale II le retour, et d’autres…autant de sujet de préoccupations inflationnistes qui ont occulté tout le reste. Ce dernier n’a d’ailleurs que peu évolué sur la période. L’économie US a de nouveau affiché une santé insolente (création d’emploi, ISM Service, PIB, …) avec en contrepartie une inflation dont le rythme de décélération se tasse. En Europe, l’Allemagne et la France ont continué à pénaliser l’économie quand l’inflation a poursuivi sa normalisation. La BCE « data-dependent » a ajusté son scénario et finalement de nouveau diminué de -25 pdb son taux de dépôt à 3,25%. Certains membres comme Villeroy de Galhau n’ont d’ailleurs pas hésité à évoquer le risque du retour de la désinflation et le danger d’être en retard sur le cycle de baisse des taux ou « behind the curve ». En Chine, pays toujours en voie de japonisation (longue crise immobilière, population vieillissante, inflation proche de zéro, …), la banque centrale (PBoC) a aussi baissé ses taux directeurs. Face à un marché US probablement plus difficile d’accès, les Chinois tenteront certainement d’inonder encore un peu plus l’Europe de leurs produits alimentant comme les décennies précédentes des forces déflationnistes. Signalons pour finir la réponse militaire des Israéliens contre l’Iran. Des craintes de frappes sur les installations pétrolières, ou nucléaires, avaient propulsé le prix du Brent au-dessus des 80 USD le baril. La réponse fut finalement mesurée et a permis un retour à 73 USD. Sur le mois, dans la perspective d’un retour de Trump et du risque inflationniste que cela pourrait impliquer, les taux d’intérêt ont été en hausse continue et marquée : +27 points de base à 2,27% pour le taux souverain allemand à 10 ans et surtout de +50 pdb à 4,28% pour le 10 ans US.

Décembre aura été marqué par une contre-performance significativedes actifs US, en lien avec une hausse quasi continue des tauxd’intérêt sur la période. Le S&P 500 a reculé de 2,39 %tandis que l’Eurostoxx 50 a progressé de 1,95 %. Ils ontclôturé 2024 en hausse respective de 25 % et 11,90 %. Lesgrandes entreprises technologiques américaines, surnommées les « 7magnifiques » (Apple, Microsoft, Alphabet, Amazon, Nvidia, Tesla et Meta),ont contribué à environ 70 % de cette hausse. Sans elles, leS&P 500 n’aurait progressé que de 7 %. Une telle concentration sur cesentreprises, certes dotées de solides fondamentaux, constitue un facteurde risque important : la moindre sérieuse déceptionpourrait entraîner d'importants mouvements de volatilité.

 Sur le mois, les tauxsouverains américains ont fortement augmenté, de +40 points debase pour le 10 ans US, à 4,57 %, soit +69 pdb sur l’année. Bien que lesdonnées d’activité aient commencé à montrer un léger ralentissement(ISM Services, Beige Book, …), l’inflation peine toujours à ralentirdavantage. Ce phénomène a d’ailleurs été souligné par la Fed lors de sa réunionde décembre. La Réserve fédérale a certes baissé ses tauxdirecteurs de 25 pdb à 4,25 %-4,50 %, mais elle n’anticipe désormais plus que deuxbaisses en 2025, contre encore quatre prévues en septembre dernier, cequi a particulièrement inquiété les investisseurs. L’économie américaineest jugée résiliente, et certains membres de la Fed ont également prisen compte un effet Trump potentiellement inflationniste. En Europe,les taux souverains ont suivi le mouvement américain : le taux souverainallemand à 10 ans est remonté à 3,20 %, enregistrant une hausse de +28pdb sur le mois et +33 pdb sur 2024. Bien que les économies allemande etfrançaise aient surpris positivement en décembre grâce à la dynamiquedes services, l’activité manufacturière continue de pénaliser l’ensemblede la zone.

Ces deux pays font en outreface à une forte incertitude politique, même si la France disposedésormais d’un nouveau Premier ministre. Sur le mois, la BCE a abaissépour la quatrième fois cette année ses taux directeurs de 25 pdb, ramenant le tauxde dépôt à 3 %. Cependant, elle reste prudente face à l’inflationdomestique et exclut toute accélération du rythme des baisses. Les tauxpourraient toutefois être de nouveau réduits lors des deux prochainesréunions de janvier et de mars. Cette résilience de l’inflationpourrait se révéler plus complexe en raison de nouvelles tensionssur les marchés énergétiques. La non-reconduction par l’Ukraine ducontrat de transit du gaz russe et, surtout, la mise en place de sanctions surla flotte fantôme transportant le pétrole russe, ont eu des impacts notables.

Dans ce contexte, lesindices obligataires Bloomberg Barclays € Aggregate et Global(couvert en euro) ont enregistré des baisses mensuelles de respectivement -1,04% et -0,93 %. Ils terminent finalement l’année en hausse deseulement 2,63 % et 1,68 %, des performances bien inférieuresaux prévisions de début d’année. Sur les marchés obligataires en 2024, ilfallait principalement être exposé au crédit, particulièrement au « highbeta », pour générer de la performance (iBoxx Eur High Yield +6,88 %).

En 2025, lesinvestisseurs devront être particulièrement attentifs aux facteurs susceptiblesde nourrir à nouveau le risque inflationniste, au premier rang desquelsfigure la mise en œuvre des « Trumponomics ». Dans cet environnement,les marchés de taux joueront probablement un rôle clé dans l’évolution desautres grandes classes d’actifs. Ils devraient par ailleurs continuer à évoluerdans un régime bien plus hors norme que celui des marchés actions. Les investisseursdevront garder leur sang-froid, car des phénomènes extrêmes, comme en 2024,risquent de se reproduire.

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Geoffroy
Landoeuer
Directeur de la Gestion Financière
Gérant Obligataire

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